Jugements

Lorsqu’un manquement à la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme ou au Code de déontologie est constaté, le commissaire soumet au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) un rapport d’enquête. Le DPCP peut décider d’intenter des poursuites auprès des contrevenants à la Loi et au Code.

Voici les résumés des jugements rendus à l’égard des personnes qui ont été ainsi poursuivies depuis l’adoption de la Loi, en ordre décroissant.

Notions abordées : Lobbyisme-conseil, communication écrite, critère objectif, exception prévue à l’article 5(2) de la Loi

En 2017, à la suite d’une enquête menée relativement à des activités de lobbyisme exercées auprès du directeur de l’urbanisme de la ville de Boisbriand par M. Philippe Castiel, le Directeur des poursuites criminelles et pénales lui transmet un constat d’infraction pour avoir exercé des activités de lobbyisme sans être inscrit au registre des lobbyistes. M. Castiel a plaidé non coupable. Le 21 décembre 2018, la juge de paix magistrat Caroline Roy de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, le déclare coupable et le condamne à payer une amende de 500$ plus les frais.

M. Philippe Castiel est ingénieur et il travaillait comme chargé de projet pour le compte de Corporation Bais Halevy dans le cadre du prolongement de la rue Moishe à Boisbriand. Le 12 février 2016, il a transmis un courriel au directeur de l’urbanisme de la ville afin de demander la tenue d’un conseil municipal extraordinaire concernant un permis de lotissement.

La juge retient que l’envoi d’un courriel peut constituer une activité de lobbyisme puisque le terme « écrit » réfère à l’ensemble des moyens de communication. Analysant le courriel du 12 février 2016 et l’ensemble des échanges entre M. Castiel et les représentants de la ville, elle conclut que la démarche de M. Castiel peut être raisonnablement envisagée comme étant susceptible d’influencer la prise de décision ou le moment où cette décision sera prise, relativement à l’octroi du permis.

La juge analyse ensuite si l’exception prévue à l’art. 5(2) de la Loi concernant les représentations faites dans le cadre d’une séance publique d’une municipalité inclut la demande de tenir une séance publique extraordinaire ». Elle mentionne que ce courriel n’est pas public et qu’en conséquence, la demande de tenir un conseil municipal extraordinaire concernant le permis de lotissement n’est pas connue des citoyens. Selon elle, le courriel du 12 février 2016 ne peut être isolé du contexte dans lequel il a été envoyé. L’examen des échanges démontre que le projet ne progresse pas au rythme souhaité et le courriel en question vise à accélérer ce processus d’approbation.

La juge Roy conclut finalement que M. Castiel ne peut pas bénéficier de l’exception prévue à l’article 5(2) de la Loi, puisque l’objectif de transparence ne serait pas atteint si ce paragraphe incluait les demandes de tenir une séance du conseil municipal.

M. Castiel porte en appel la décision de la Cour du Québec le déclarant coupable. Le 28 juillet 2020, la Cour supérieure rejette l’appel et maintient la décision de la juge de première instance. La Cour supérieure conclut que la juge Roy n’a pas commis d’erreur en concluant que l’envoi du courriel du 12 février 2016 pouvait raisonnablement être considéré comme une activité de lobbyisme. La juge a pris en considération la définition d’activités de lobbyisme prévue à l’article 2 de la Loi afin d’appliquer le critère approprié, soit le critère objectif de la personne raisonnable.

Toujours selon la Cour supérieure, la juge Roy n’a également pas commis d’erreur en tenant compte du contexte entourant l’envoi du courriel du 12 février 2016, dont des courriels échangés avant et après celui-ci. La Cour supérieure précise que le contexte est important et pertinent pour bien comprendre la situation. Elle ajoute que le fait d’isoler le courriel du restant de la preuve et l’analyser seul sans tenir compte du contexte aurait en soi constitué une erreur.

Également, la Cour supérieure retient la conclusion de la juge de première instance voulant que la demande de tenir une assemblée extraordinaire n’est pas visée par l’exception prévue à l’article 5(2) de la Loi. Reprenant l’analyse de la juge de première instance, la Cour supérieure fait notamment référence au fait que si le législateur a pris le soin de prévoir cette exception c’est parce qu’à contrario il voulait que les communications à l’extérieur du cadre d’une séance publique soient assujetties à la Loi, et que d’interpréter autrement cette exception ne permettrait pas d’atteindre l’objectif de transparence visé par le législateur.

M. Castiel dépose à la Cour d’appel du Québec une demande pour autorisation d’en appeler du jugement rendu en Cour supérieure, rejetant l’appel de la déclaration de culpabilité prononcée le 21 décembre 2018 par le juge de paix magistrat Caroline Roy. Cette demande est entendue le 4 septembre 2020 et l’autorisation d’appeler est accueillie le 8 septembre 2020.

Le 2 février 2022, la Cour d’appel du Québec rejette l’appel et confirme le jugement rendu par la Cour supérieure, confirmant par le fait même la décision de la Cour du Québec déclarant M. Castiel coupable d’avoir exercé des activités de lobbyisme sans être inscrit au registre des lobbyistes.

La Cour d’appel confirme que l’infraction d’avoir exercé des activités de lobbyisme sans être inscrit au registre des lobbyistes est une infraction de responsabilité stricte, qui ne nécessite pas la démonstration de l’intention coupable (mens rea). La Cour conclut que l’utilisation des mots « en vue d’influencer ou pouvant raisonnablement être considérées, par la personne qui les initie, comme étant susceptible d’influencer la prise de décisions » dans la définition d’activité de lobbyisme à l’article 2 de la Loi n’établit pas l’intention, mais sert plutôt à décrire et définir les caractéristiques intrinsèques d’une communication écrite ou orale avec un titulaire de charges publiques. La Cour d’appel confirme que l’intention de la personne qui initie la communication n’est pas en jeu et qu’il faut plutôt se référer au critère objectif de la personne raisonnable mise dans les mêmes circonstances afin de déterminer si une communication est susceptible d’influencer la prise de décisions d’un titulaire de charges publiques.

Bien que la Cour d’appel mentionne ne pas devoir, en principe, s’attarder aux autres éléments soulevés en appel, celle-ci se penche tout de même sur les éléments suivants : la prise en compte du contexte entourant le courriel pour qualifier celui-ci d’activité de lobbyisme et le refus d’appliquer l’exception de l’article 5(2) de la Loi.

La Cour d’appel souligne que la juge de première instance n’a commis aucune erreur en tenant compte du contexte entourant le courriel du 12 février 2016 afin de conclure qu’il s’agissait d’une activité de lobbyisme, cette communication ne pouvant être bien comprise qu’à la lumière de l’ensemble de la démarche de M. Castiel auprès de la ville. Elle souligne également que la juge de première instance n’a pas commis d’erreur en rejetant la prétention de M. Castiel d’assimiler la demande écrite de tenir une assemblée extraordinaire à une séance publique de la ville, mentionnant que cela ne cadre pas avec le libellé même de l’article 5(2) de la Loi. La demande n’étant pas publique, la Cour d’appel conclut qu’il n’y avait pas lieu de considérer une demande privée pour tenir une telle séance comme s’il s’agissait d’une séance publique bénéficiant d’une exemption.

Pour lire les jugements :

Cour du Québec 2018-12-21
Déclaré coupable de l’infraction reprochée
DPCP c. Castiel, 2018 QCCQ 9418

Cour supérieure du Québec 2020-08-28
Appel du jugement rendu 2018-12-21 rejeté
DPCP c. Castiel, 2020 QCCS 2426

Cour d’appel du Québec 2020-09-04
Demande pour autorisation d’appel hors délais – 2020-09-08 Accueillie
Castiel c. DPCP, 2020 QCCA 1149

Cour d’appel du Québec 2022-02-02
Appel du jugement rendu le 2020-08-28 – Rejeté
Castiel c. DPCP, 2022 QCCA 145

Notions abordées : Lobbyiste d’entreprise, partie importante, avis 2005-07, résolution d’appui

En 2008, six constats d’infraction sont signifiés à M. David Cliche pour des activités de lobbyisme exercées auprès de titulaires de charges publiques des municipalités de Stanbridge Station, de Saint-Pierre-de-Véronne-à-Pike-River et du canton de Bedford dans le cadre d’un projet de développement éolien. Un constat d’infraction est également signifié au plus haut dirigeant de la firme de génie-conseil SM International, M. Bernard Poulin, pour avoir omis d’inscrire M. Cliche au registre des lobbyistes. MM. Cliche et Poulin plaident non coupables pour chacune des infractions.

À la suite du dépôt de ces poursuites, MM. Cliche et Poulin présentent à la Cour supérieure une requête en jugement déclaratoire demandant notamment que soit déclaré illégal un avis du commissaire au lobbyisme ayant une incidence sur les poursuites pénales.

Le 13 juin 2012, la Cour supérieure rejette cette requête en jugement déclaratoire au motif que celle-ci est liée aux procédures pénales intentées contre eux. Elle précise qu’il serait inopportun de disposer de la question de la portée ou de la légalité des avis avant même que la Cour du Québec ait eu l’occasion de se prononcer. Les demandeurs portent ce jugement en appel devant la Cour d’appel du Québec; celle-ci rejette l’appel le 25 janvier 2013.

La cause civile terminée, le procès en matière pénale se tient devant la Cour du Québec en avril 2015. Dans un jugement rendu le 27 mai 2015, MM. Cliche et Poulin sont acquittés des accusations portées contre eux. Le juge reconnaît que les démarches effectuées par M. Cliche auprès de titulaires de charges publiques municipaux afin d’obtenir une résolution d’appui constituent manifestement des activités de lobbyisme. Toutefois, il retient la preuve présentée par la défense quant au fait que M. Cliche n’est pas un lobbyiste d’entreprise et qu’il bénéficiait d’une exception prévue par la Loi, à savoir que les communications ont eu lieu dans le cadre de procédures connues du public. Concernant M. Poulin, le juge l’acquitte au motif que le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) ne s’est pas déchargé de son fardeau de démontrer hors de tout doute raisonnable que M. Poulin était, le 30 septembre 2007, le plus haut dirigeant du Groupe SM International.

Le DPCP  porte en appel une partie de cette  décision, soit celle concernant l’acquittement de M. Cliche. Le 15 mars 2016,  la Cour supérieure renverse la décision rendue en mai 2015 et elle reconnaît coupable M. Cliche des six infractions à la Loi. Dans son jugement, elle conclut notamment que M. Cliche répond à la définition de lobbyiste d’entreprise au sens de la Loi et de l’avis du commissaire au lobbyisme, dont le tribunal reconnaît la valeur. Elle précise que les démarches de M. Cliche constituent des activités de lobbyisme et que ce dernier ne s’est pas déchargé de son fardeau d’établir, selon la balance des probabilités, qu’il pouvait bénéficier des exceptions prévues à la Loi.

M. Cliche dépose à la Cour d’appel du Québec une requête pour permission d’en appeler du jugement rendu en Cour supérieure. Cette requête est entendue le 2 mai 2016 et elle est accordée le jour même.

Le 28 avril 2017, la Cour d’appel rétablit l’acquittement de M. Cliche pour l’ensemble des chefs d’accusation. Celle-ci considère que la preuve ne démontre pas que M. Cliche exerce des activités de lobbyisme « pour une partie importante » et donc, qu’il n’est pas un lobbyiste d’entreprise. Elle précise qu’il faut examiner la partie de « l’emploi ou de la fonction » de la personne concernée et non l’impact d’un projet pour une entreprise.

Pour le commissaire au lobbyisme, ce jugement de la Cour d’appel vient resserrer l’utilisation de certains critères qualitatifs contenus dans l’Avis 2005-07.

L’appréciation de la « partie importante » pour déterminer si une personne se qualifie à titre de lobbyiste d’entreprise ou de lobbyiste d’organisation doit reposer, à son avis et à la lumière de ce récent jugement, sur une analyse de la régularité et de l’intensité des activités de lobbyisme exercées par une personne.

Pour lire les jugements :

Cour supérieure du Québec
13 juin 2012
Requête en jugement déclaratoire – Rejetée
* Les parties demandent à la C.S. de se prononcer sur la portée juridique des avis émis par le CLQ. La C.S. estime qu’il appartient à la C.Q. de statuer à ce sujet
Poulin c. CLQ,  2012 QCCS 2573

Cour d’appel du Québec
25 janvier 2013
Appel du jugement rendu le 2012-06-13 – Rejeté
Retour du dossier à la Cour du Québec
Poulin c. CLQ, 2013 QCCA 131 

Cour du Québec
27 mai 2015
Acquitté des infractions reprochées
DPCP c. Cliche, 2015 QCCQ 4360 

Cour supérieure du Québec
15 mars 2015
DPCP c. Cliche, 2016 QCCS 1288 

Cour d’appel du Québec
28 avril 2017
Appel du jugement rendu le 2016-03-15 – Accueilli
Acquitté des infractions reprochées
Cliche c. DPCP, 2017 QCCA 668 

Notions abordées : lobbyiste d’entreprise, réponse à une demande écrite, procédure publique, négociation postérieure à l’attribution d’un contrat

En avril 2015, le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) signifie sept constats d’infraction, dont quatre à Mme Cindy Simard et trois à M. Christian Lévesque, respectivement présidente et administrateur de l’entreprise Club de hockey 3L (2010) inc. Six des sept constats d’infraction ont trait à des activités de lobbyisme qui auraient été exercées par Mme Simard et M. Lévesque auprès de la Ville de Rivière-du-Loup, sans qu’elles soient inscrites au registre des lobbyistes. Le septième constat concerne Mme Simard à titre de plus haute dirigeante de l’entreprise quant à l’inscription au registre des lobbyistes.

Les défendeurs plaident non coupables pour chacune des infractions. Une décision est rendue le 31 janvier 2017. Sur sept constats d’infraction, le tribunal prononce deux acquittements et cinq arrêts des procédures.

D’une part, la Cour reconnaît que certaines des démarches effectuées dans le but d’obtenir un soutien financier auprès de la Ville de Rivière-du-Loup constituent des activités de lobbyisme. D’autre part, la Cour conclut que les défendeurs se qualifient à titre de lobbyistes d’entreprise. Néanmoins, la juge prononce deux acquittements relativement aux communications effectuées en juin 2014 lors d’une rencontre au motif que la preuve présentée ne démontre pas que les échanges constituent des activités de lobbyisme.

Elle considère aussi que la lettre transmise le même jour à la suite de cette rencontre était en réponse à la demande écrite de la Ville. Quant aux cinq autres infractions, elle retient la prétention des défendeurs qui s’appuie  sur l’erreur de droit provoquée par une personne en autorité et prononce l’arrêt des procédures. À cet égard, elle juge que le maire est une personne en autorité qui a induit les défendeurs en erreur en refusant leur demande de faire des représentations en séance publique du conseil municipal et en leur suggérant plutôt de les rencontrer en privé. Rappelons que les représentations effectuées dans le cadre d’une séance publique d’une municipalité ne sont pas des activités de lobbyisme puisqu’elles sont expressément exclues de la Loi en vertu du paragraphe 3 de l’article 5.

Dans ce dossier, la Cour rappelle que le lobbyisme est un moyen légitime d’accès aux institutions, mais que certaines règles d’encadrement doivent être respectées. Elle affirme également que les reportages et les conférences de presse ne sont pas des procédures publiques au sens de la Loi.

Pour lire le jugement : 

Cour du Québec
31 janvier 2017
Arrêt des procédures quant à 3 constats d’infractions
Acquitté de l’infraction reprochée dans le 4e constat
DPCP c. Simard, 2017 QCCQ 583 

* Le DPCP a porté ce jugement en appel avant de déposer un avis de désistement

Notions abordées : lobbyistes d’entreprise, offres de services professionnels, résolution, plus haut dirigeant

En 2010, suite à une enquête menée relativement à des activités de lobbyisme exercées auprès de municipalités du Bas-Saint-Laurent par des représentants d’entreprises du groupe BPR, le Directeur des poursuites criminelles et pénales transmet :

  • cinq constats d’infraction à M. Francis Gagnon, quatre à Mme Annie Lefebvre et trois à M. Stephen Davidson pour avoir fait des activités de lobbyisme sans être inscrits au registre des lobbyistes.
  • un constat à M. Yvon Tourigny, en tant que plus haut dirigeant de l’entreprise, pour ne pas avoir inscrit ces lobbyistes au registre des lobbyistes.

Au terme du procès, la juge Ellen Paré, de la Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale, reconnait coupables, le 4 mai 2015, ces quatre personnes de toutes les infractions qui leur sont reprochées.

Seul M. Yvon Tourigny en appelle de cette décision. Le 14 septembre 2016, le juge Michel Pennou, de la Cour supérieure, acquitte M. Tourigny de cette accusation pour le motif que le ministère public n’a pas démontré hors de tout doute raisonnable que M. Tourigny était le plus haut dirigeant de l’entreprise au moment des faits reprochés.

Le jugement de la Cour du Québec confirme que la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme est d’ordre public et qu’elle requiert une interprétation large afin d’assurer le respect de son objet et de son esprit. Il y est précisé que dans l’interprétation des termes, le Tribunal doit privilégier l’interprétation la plus favorable à la réalisation de son objet.

Lire les jugements : 

Cour du Québec
4 mai 2015
Les 4 défendeurs sont reconnus coupable des infractions reprochées.
R. c. Gagnon, 2015 QCCQ 4522 

Cour supérieure du Québec
14 septembre 2016
M. Yvon Tourigny porte la décision en appel pour son dossier uniquement – Acquittement de l’infraction reprochée.
Tourigny c. R., 2016 QCCS 4493 

Notions abordées : lobbyiste d’entreprise, partie importante, avis 2005-07

En 2010, au terme d’une enquête menée relativement à des activités de lobbyisme exercées auprès de municipalités du Bas-Saint-Laurent par des représentants d’entreprises du groupe BPR, le Directeur des poursuites criminelles et pénales transmet  2 constats d’infraction à Mme Geneviève St-Pierre pour avoir fait des activités de lobbyisme sans être inscrits au registre des lobbyistes.

Dans cette affaire, il s’agit essentiellement de déterminer si Mme St-Pierre était un cadre de l’entreprise.

Le juge au dossier retient la preuve présentée par la défense exposant que malgré son titre de directrice du développement des affaires, Mme St-Pierre n’est pas cadre de l’entreprise : elle est embauchée à titre d’ingénieure, elle ne bénéficie pas d’une rémunération propre aux cadres et elle n’a aucune fonction de supervision auprès du personnel.

Ainsi, concluant qu’elle ne se qualifie pas à titre de lobbyiste d’entreprise, il acquitte Mme St-Pierre des accusations qui pèsent contre elle.

Pour lire le jugement :

Geneviève St-Pierre (BPR-Infrastructure Inc.)
Cour du Québec
22 novembre 2013
Acquittée des infractions reprochées
DPCP c. St-Pierre 

Notions abordées : lobbyiste d’entreprise, procédures judiciaires, avis 2005-05

Le 10 septembre 2014, le Directeur des poursuites criminelles et pénales signifie quatre constats d’infraction à M. Michel Dallaire, président de Groupe Dallaire inc, à la suite des conclusions d’un rapport d’enquête que lui a transmis le Commissaire au lobbyisme du Québec le 30 juillet 2014.

Trois des constats d’infraction ont trait à des activités de lobbyisme qui auraient été exercées par M. Dallaire, pour le compte de l’entreprise Groupe Dallaire inc., auprès de la mairesse, de la présidente de la Commission consultative d’urbanisme et d’aménagement et de la directrice adjointe du Service de l’urbanisme et des arrondissements de la Ville de Lévis au moment des faits. Ces activités de lobbyisme auraient été exercées sans qu’elles soient inscrites au registre des lobbyistes, comme l’exige l’article 25 de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme.

Le quatrième constat fait état d’un manquement à l’article 8, alinéa 2, de la Loi qui établit que le plus haut dirigeant de l’entreprise ou du groupement pour le compte duquel le lobbyiste exerce ses activités doit procéder à son inscription au registre des lobbyistes.

Le défendeur plaide non coupable et l’audience devant la Cour du Québec a lieu les 5, 6 et 7 janvier 2016.

Le 16 mai 2016, M. Dallaire est acquitté de l’ensemble des infractions qu’on lui reproche. Dans son jugement, le juge Carol Saint-Cyr considère essentiellement que la lettre de M. Dallaire transmise à l’ancienne mairesse et à la Commission consultative d’urbanisme et d’aménagement de la Ville constitue une représentation faite préalablement à des procédures judiciaires, de sorte que l’exception prévue à l’article 5(1) de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme trouve application dans les circonstances particulières de ce dossier.

Pour lire le jugement : 

Cour du Québec 2016-05-16
Acquitté des infractions reprochées
DPCP  c. Dallaire, 2016 QCCQ 3936 

Notions abordées : lobbyistes d’organisation, modifications législatives, demande écrite d’un titulaire de charge publique, comités conjoints, avis 2009-01

En 2009, deux constats d’infraction sont signifiés à M. Gaétan Barrette agissant pour le compte de la Fédération des médecins spécialistes du Québec et deux constats d’infraction sont signifiés à M. Frédéric Desjardins, agissant pour le compte de l’Association des radiologistes du Québec. L’ensemble de ces constats concerne des communications effectuées auprès du ministère de la Santé et des Services sociaux ainsi que leur obligation, comme plus hauts dirigeants de ces deux organisations, d’inscrire les activités de lobbyisme au registre des lobbyistes. Un plaidoyer de non culpabilité est enregistré pour chacune des infractions reprochées.

En plus de contester les infractions reprochées, les défendeurs contestent la constitutionnalité de certaines dispositions de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme, alléguant qu’elles portent atteinte à la liberté d’expression, au droit de toute personne d’adresser une pétition à l’Assemblée nationale et à la liberté d’association qui protège le droit à la négociation collective.

Dans son analyse, la Cour ne retient pas les arguments constitutionnels. Celle-ci constate que M. Barrette et M. Desjardins ont exercé des activités de lobbyisme visée par la Loi en envoyant une lettre au ministre de la Santé et des Services sociaux en vue d’influencer une modification législative. Cependant, elle conclut que cette lettre a été envoyée à la demande d’un fonctionnaire du ministère de la Santé et des Services sociaux.

La Cour estime que l’exception prévue au paragraphe 10 de l’article 5 de la Loi trouve application, suivant la trame factuelle ayant été administrée en preuve. M. Barrette et M. Desjardins sont donc acquittés des infractions reprochées.

Pour lire le jugement : 

Cour du Québec
2014-09-12
Acquitté des infractions reprochées
DPCP c. Barrette, 2014 QCCQ 11700 

Notions abordées : lobbyistes d’entreprise, résolution d’appui, titulaires de charges publiques, partie importante, avis 2005-07, procédure publique ou connue du public, avis 2005-06

En juillet 2011, au terme d’une enquête relative à des activités de lobbyisme exercées par le président de Radio Dégelis inc. et des représentants d’entreprises affiliées au Groupe Radio Simard auprès de titulaires de charges publiques de la Ville de Rivière-du-Loup, le Directeur des poursuites criminelles et pénales signifie quatre constats d’infraction pour des manquements à la Loi, soit :

  • un à M. Guy Simard et un à Mme Renée Giard, tous deux de Groupe Radio Simard, pour avoir fait des activités de lobbyisme sans être inscrits au registre des lobbyistes;
  • un à M. Guy Simard, en tant que plus haut dirigeant de Groupe Radio Simard, et un à M. Gilles Caron, en tant que plus haut dirigeant de Radio Dégelis inc, pour ne pas avoir inscrit un lobbyiste au registre des lobbyistes.

M. Caron plaide coupable le jour du procès et se voit vu imposer une amende de 500 $.

Dans cette affaire, il s’agit essentiellement de déterminer si :

  • la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme est applicable, considérant le contexte lié à la radiodiffusion qui est de juridiction fédérale;
  • les agissements des défendeurs auprès d’un élu municipal constituent une activité de lobbyisme au sens de la Loi.

Concernant le premier point, le juge Kouri rappelle que ce que souhaitaient influencer les défendeurs, c’est une résolution municipale. Que celle-ci porte sur un sujet de nature fédérale, provinciale ou municipale n’est pas un élément à considérer. Il s’agit donc d’une décision visée par la loi québécoise.

En ce qui a trait au deuxième point, le juge ne retient pas les exceptions invoquées par la défense, qui prétendait que M. Simard et Mme Giard n’étaient pas des lobbyistes, que les représentations faites auprès de la municipalité étaient faites dans le cadre d’une procédure juridictionnelle du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes et que les communications étaient faites dans le cadre d’une procédure publique ou connue du public. Le juge rejette toutes ces prétentions et conclut que M. Simard et Mme Giard ont fait des communications auprès d’élus municipaux en vue d’influencer une résolution de la municipalité. Le jugement est rendu le 16 mai 2014. Le juge Kouri reconnaît M. Guy Simard et Mme Renée Giard coupables des infractions reprochées.

Pour lire le jugement :

Cour du Québec
2014-05-16
Coupable de l’infraction reprochée
DPCP c. Simard, 2014 QCCQ 4216 

Notions abordées : Lobbyiste d’organisation, ordre professionnel, protection du public, demande écrite d’un titulaire de charge publique, partie importante, avis 2005-07

En 2007, cinq constats d’infraction concernant cinq manquements présumés à la Loi sont signifiés à M. Pierre Mathieu, en tant que président de l’Ordre des ingénieurs forestiers du Québec (OIFQ) et M. Jean Gobeil, en tant que directeur général par intérim de l’OIFQ. Ces infractions concernent des activités de lobbyisme relatives au calcul de la possibilité forestière et à la pratique professionnelle des ingénieurs forestiers auprès de titulaires de charges publiques du gouvernement du Québec.

Les deux défendeurs sont acquittés une première fois des accusations qui pesaient contre eux à la suite d’une requête en non-lieu. Le Directeur des poursuites criminelles et pénales en appelle de la décision et la Cour supérieure annule les verdicts d’acquittement et ordonné la tenue d’un nouveau procès. Les défendeurs, à leur tour, portent en appel cette décision devant la Cour d’appel. La Cour rejette l’appel des défendeurs estimant que le jugement de la Cour supérieure ne comportait aucune erreur et que c’est à bon droit que le juge avait cassé les verdicts d’acquittement et ordonné la tenue d’un nouveau procès.

Lors du nouveau procès devant la Cour du Québec, MM. Mathieu et Gobeil sont reconnus coupables d’avoir exercé des activités de lobbyisme sans être inscrits au registre des lobbyistes et ce, contrairement à l’article 25 de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme. De plus, le juge de la Sablonnière rejette l’argument de la défense relativement à l’inconstitutionnalité de l’article 25 de même que l’argument voulant que la notion de lobbyiste d’organisation contenue dans la Loi soit vague et imprécise.

Ce jugement confirme que :

  • les ordres professionnels sont visés par la Loi;
  • le fait que la communication soit faite dans un but de protection du public n’est pas une exclusion à l’application de la Loi.

En ce qui a trait à l’infraction d’avoir fait des activités de lobbyisme sans être inscrit au registre des lobbyistes (article 25 de la Loi), il conclut :

  • qu’il s’agit d’une infraction de responsabilité stricte, donc sans élément de mens rea et que le poursuivant n’a donc pas à démontrer que le défendeur avait l’intention d’influencer le titulaire d’une charge publique;
  • que lors d’une poursuite, le poursuivant doit démontrer qu’une personne a exercé des activités de lobbyisme auprès d’un titulaire d’une charge publique, sans être inscrite au registre – il n’a pas à démontrer que le défendeur est un lobbyiste;
  • qu’il revient au défendeur de prouver qu’une exemption ou qu’une excuse s’applique (notamment le fait qu’il ne s’agit pas d’un lobbyiste au sens de l’article 3 de la Loi) et que « ce fardeau ne porte pas atteinte à l’article 11 (d) de la Charte qui protège la présomption d’innocence puisqu’il s’agit d’une infraction contre le bien public »;

Aussi, ce jugement reconnaît que les avis du commissaire au lobbyisme ont une certaine valeur et peuvent même constituer un facteur important en cas de doute sur l’interprétation à donner à la Loi.

Pour lire les jugements : 

Cour du Québec
2009-12-10
Acquittement des infractions reprochées
DPCP c. Mathieu, 2009 QCCQ 13671 

Cour supérieure du Québec
2010-05-12
Casse le verdict d’acquittement et ordonne la tenue d’un nouveau procès.
DPCP c. Mathieu, 2010 QCCS 1906 

Cour d’appel du Québec
2010-07-15
Accorde la permission de faire appel
Mathieu c. DPCP, 2010 QCCA 1343 

Cour du Québec – Nouveau Procès
2011-10-28
Coupable des infractions reprochées
DPCP c. Matthieu, 2011 QCCQ 12594 

Notions abordées : Lobbyiste-conseil – défense de diligence raisonnable – inscription déléguée à un tiers

En 2018, à la suite d’une enquête menée par le Commissaire au lobbyisme du Québec relativement à des activités de lobbyisme exercées par M. Sébastien Sénéchal auprès du ministère des Finances, du ministère de la Sécurité publique et de la Régie des alcools, des courses et des jeux, le Directeur des poursuites criminelles et pénales transmet deux constats d’infraction. Ceux-ci reprochent à M. Sénéchal d’avoir exercé des activités de lobbyisme sans être inscrit au registre des lobbyistes. Il plaide non coupable pour chacune de ces infractions.

Le 24 janvier 2019, l’honorable juge Josée De Carufel de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, le déclare coupable des deux infractions et le condamne à payer une amende de 500 $, plus les frais, pour chacune d’elles.

Parmi les faits, le tribunal retient que M. Sénéchal agissait à titre de représentant de l’Union des tenanciers de bars du Québec (UTBQ), un organisme à but non lucratif. À ce titre, il a rédigé et signé une première lettre adressée au ministre des Finances et acheminée également au ministre de la Sécurité publique et au président de la Société des établissements de jeux, demandant l’adoption d’un décret fixant la mise en vigueur d’un permis. Il a signé et acheminé une deuxième lettre à la présidente de la Régie des alcools, des courses et des jeux, lui demandant de mettre en place rapidement un système informatique pour le traitement de ce type de permis.

Le tribunal retient que l’envoi des lettres constituait une activité de lobbyisme. Précisément, M. Sénéchal, en envoyant les lettres, agissait à titre de lobbyiste-conseil pour son client, l’UTBQ. En effet, M. Sénéchal a reçu des honoraires de l’UTBQ pour effectuer ces communications, et ce, sans avoir un emploi ou une fonction dans l’organisme.

Le tribunal a analysé les prétentions du défendeur concernant la défense de diligence raisonnable, en comparant ses gestes avec ceux d’un lobbyiste raisonnable. Dans ce cadre, il conclut que M. Sénéchal n’a pas démontré toute la diligence requise dans les circonstances, en ne s’inscrivant pas au registre des lobbyistes, mais en se fiant plutôt à une autre personne pour le faire à sa place.

M. Sénéchal porte en appel cette décision devant la Cour supérieure du Québec. Le 11 novembre 2019, celle-ci confirme le jugement de la Cour du Québec.

Pour lire les jugements :

Cour du Québec

24 janvier 2019

Déclaré coupable des infractions reprochées

Directeur des poursuites criminelles et pénales c. Sébastien Sénéchal, 500-61-479552-185 et 500-61-481429-182 (jugement rendu oralement)

Cour supérieure du Québec

11 novembre 2019

Appel du jugement rendu le 24 janvier 2019 rejeté

Sénéchal c. Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2019 QCCS 4732 

Notions abordées : Lobbyiste d’organisation, fins patronales, partie importante, avis 2005-07

En 2019, au terme d’une enquête menée relativement à des activités de lobbyisme exercées auprès du ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport et de la ministre responsable de l’Enseignement supérieur, le Directeur des poursuites criminelles et pénales transmet trois constats d’infraction à M. Bernard Marc Tremblay, président-directeur général de la Fédération des cégeps, pour avoir effectué des activités de lobbyisme sans être inscrit au registre des lobbyistes.

Le défendeur plaide non coupable pour chacune des infractions reprochées. Le 18 juin 2021, l’honorable juge Nicole Martin, de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, acquitte M. Tremblay de toutes les infractions reprochées contre lui.

Dans cette affaire, il s’agit essentiellement de déterminer si :

  • M.  Tremblay exerce des activités de lobbyisme pour une partie importante et répond à la définition de lobbyiste d’organisation prévue à l’article 3 de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme;
  • la Fédération des cégeps, groupement à but non lucratif pour  le compte duquel M. Tremblay exerce les activités de lobbyisme faisant l’objet des infractions reprochées, est constituée à des fins patronales, auquel cas le défendeur ne pourrait pas bénéficier de l’exception prévue au paragraphe 11 de l’article 1 du Règlement relatif au champ d’application de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme.

Concernant le premier point, la Cour conclut, suivant analyse des éléments présentés au procès, qu’une partie importante de la fonction du défendeur est occupée par des activités de lobbyisme auprès de titulaires de charges publiques. Le Tribunal conclut donc que M. Tremblay est un lobbyiste d’organisation au sens de l’article 3 de la Loi.

Concernant le deuxième point, la Cour estime que le défendeur a été en mesure de démontrer, selon la balance des probabilités, que la Fédération des cégeps n’est pas constituée à des fins patronales. Ainsi, elle estime que l’exception prévue au paragraphe 11 de l’article 1 du Règlement relatif au champ d’application de la Loi trouve application.

M. Tremblay est donc acquitté des infractions reprochées.

Pour lire le jugement 

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